Le sociologue Pierre Fraser propose une brève réflexion philosophique et sociologique à la portée de tous. Articulée autour d’un réenchantement du monde par le truchement des technologies numériques et ceux qui les conçoivent, les nerds, cette réflexion avance trois hypothèses : (i) un nouvel individu émerge, la iPersonne, architecte de sa vie et maître de son destin, devenu un simple nœud du grand réseau numérique auquel on peut se connecter à volonté ou duquel on peut se déconnecter à volonté ; (ii) une nouvelle structure sociale émerge, la société technolibérale articulée autour de nœuds numériques ; (iii) une nouvelle forme de cognition émerge, celle d’une externalisation graduelle des fonctions cognitives du cerveau. 

Loin de mettre fin aux mythes du Progrès et de l’Avenir radieux, les technologies numériques les renforcent. Le passé d’un côté, l’avenir radieux de l’autre, un avenir organisé par l’homme et ses technologies numériques, échappant à la nature et à son développement spontané, appellent un Avenir radieux, certes sans folies meurtrières, certes sans profession de foi, mais peut-être tout aussi aliénant et prometteur à la fois. Une seule chose est attendue de l’individu, une adhésion volontaire au credo du bonheur par technologies interposées. C’est le genre de citoyen dont a besoin une société technolibérale, bien à sa place, sous surveillance légère, mais non contraignante.